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Le Livre Blanc de la Parapsychologie

Le Livre Blanc de la Parapsychologie

L’Institut Métapsychique International vous propose un travail de recensement des sociétés de parapsychologie de par le monde, présentant leur organisation et leurs recherches. Dans l’article ci-dessous, vous trouverez l’introduction et la synthèse de ce travail effectué en 2008. Vous pouvez également télécharger gratuitement l’intégralité du Livre Blanc de la Parapsychologie.

Introduction

Cadre général du livre blanc

La vocation internationale de l’Institut Métapsychique International se traduit depuis sa création par des collaborations avec les chercheurs étrangers, l’organisation de congrès internationaux et la centralisation des informations sur les recherches effectuées dans d’autres pays grâce à un large réseau de correspondants. L’IMI avait ainsi déjà effectué un travail de recensement, en 1955 et en 1979, des sociétés de parapsychologie et de leurs activités. La commande de ce livre blanc auprès de l’Institut est donc l’occasion d’effectuer un nouveau travail de recensement.
Pour réaliser ce travail, nous avons profité de ce formidable outil qu’est Internet. En effet, la grande majorité des sociétés de parapsychologie possèdent un site dont une section en anglais recense les informations pertinentes quant à son organisation, son histoire et les recherches qui y sont conduites. De nombreux articles de recherche sont même directement disponibles en ligne. Internet nous a également permis un contact facile avec de nombreux centres de recherche afin vérifier les informations ainsi recueillies.
Si nous avons fait notre possible pour atteindre un certain niveau d’exhaustivité, ce livre blanc ne peut être considéré comme un travail rendant compte dans le détail du panorama parapsychologique actuel. Un tel travail aurait en effet demandé une analyse de la littérature plus approfondie et aurait surtout nécessité de se déplacer directement dans les centres de recherche. Nous avons donc fait notre possible, avec le temps et le moyens dont nous disposions, afin d’offrir une vue d’ensemble qui nous parait rendre compte assez fidèlement de la situation actuelle de la recherche parapsychologique. Dans cette perspective, outre le recensement des centres de recherches, de leur équipe de direction et de leurs publications récentes, nous avons fait le choix de résumer un certain nombre de recherches qui nous paraissent importantes dans le contexte actuel. Dans une perspective plus universitaire, un index des centres de recherches à l’université est également disponible en annexe. Quant aux informations historiques, elles proviennent principalement des nombreux articles disponibles sur le sujet (Parra, 1997 ; Rueda, 1991 ; Zangari & Machado, 2001 ; Zha & McConnell, 1991 ; McClenon, 1989 ; Irwin, 1988c ; Keil, 1981 ; Gissurarson & Haraldsson, 2001 ; Alvarado, 1984 ; May & Vilenskaya, 1992 ; Vilenskaya & May, 1992 ; Angoff & Shapin, 1973, Krippner, 1992). Enfin, il nous a semblé pertinent de commencer ce livre blanc par un bref historique permettant de mieux comprendre les dimensions historiques à l’origine de la parapsychologie actuelle.

De la parapsychologie d’hier à la parapsychologie d’aujourd’hui

Le développement de la parapsychologie tire ses racines de la vieille Europe et plus particulièrement de la France. Les controverses sur le magnétisme animal, le somnambulisme lucide, la baguette divinatoire et les tables tournantes ont été dans l’hexagone les premières plateformes d’un échange de vues entre scientifiques du XVIe au XIXe siècle. L’institutionnalisation est venue du Royaume-Uni, avec la Société Dialectique de Londres en 1869 et la Société pour la Recherche Psychique (SPR) en 1882. Cette institutionnalisation s’est ensuite étendue à d’autres pays : les Etats-Unis, en 1884, avec l’American SPR ; la France, en 1885, avec la Société de Psychologie Physiologique dont la majeure partie des débats tournaient autour de l’hypnose et des phénomènes psychiques ; à Tokyo, en 1886 ; puis avec d’autres sociétés équivalentes à la SPR en Allemagne (d’où provient le terme « parapsychologie » forgé en 1889 par le jeune Max Dessoir), au Danemark, en Italie, Pologne, Irlande, Autriche, Grèce, Australie, etc.
L’Europe continua de dominer les débats au début du XXe siècle. Des congrès internationaux se sont tenus à Copenhague (1921), Varsovie (1923), Paris (1927), Athènes (1930) et Oslo (1935). La plupart des grands chercheurs faisaient l’effort de connaître plusieurs langues et de s’informer fréquemment de ce que faisaient leurs voisins. Ces échanges permettaient de procéder à des reproductions des expériences, ce qui consistait souvent à l’époque à faire venir tel ou tel sujet « doué » dans le laboratoire le plus réputé du pays. Cette hégémonie européenne s’exporta ensuite sur d’autres continents. On peut donner l’exemple de l’Argentine qui s’appuyait beaucoup sur les travaux des métapsychistes français. Réussissant à s’extraire des croyances populaires, les chercheurs argentins ont réussi à institutionnaliser la parapsychologie et à l’imposer à l’Université en se présentant comme des critiques des croyances spirites et en introduisant la méthodologie scientifique en psychologie.
A partir de 1927, Joseph Banks et Louisa Rhine, encouragés par William McDougall, ont mis au point des programmes de recherche plus systématiques sur la Perception Extra-Sensorielle et la Psychokinèse au Laboratoire de Parapsychologie de l’Université de Duke, aux Etats-Unis. Il ne s’agit plus dès lors de tester des sujets doués – et souvent capricieux – mais d’inviter des personnes sans capacités particulières à participer à des tests dont les conditions se veulent rigoureuses. Progressivement, tous les regards se tourneront vers les Etats-Unis et cette nouvelle méthodologie. La parapsychologie avait en effet élaboré une nouvelle approche, alliant l’étude quantitative, analysée par des statistiques (par J.B Rhine), et le recueil de cas spontanés, associé à une large analyse phénoménologique (travail de Louisa Rhine, repris depuis par sa fille Sally).
Dans le même temps, un autre paradigme prit naissance en U.R.S.S. Celui-ci se basait sur les doctrines de Pavlov associées à un physicalisme strict. Les phénomènes psychiques étaient compris comme des signaux produits par le corps, que l’on pouvait entraîner par renforcement. Ce paradigme prit plus tard le nom de « psychotronique » et fut davantage présent sur la scène mondiale dans les années 70-80. Il fut surtout suivi en Chine et au Japon dans le cadre de sciences étudiant la part de réalité de certaines croyances traditionnelles et des énergies subtiles censées être maîtrisables par les arts martiaux.
La recherche européenne conserva son identité malgré les influences exercées par ces deux blocs, identité qui se caractérisait notamment par sa transdisciplinarité. Comme le montra le premier congrès international de parapsychologie à Utrecht, en 1953, organisé par la Parapsychology Foundation, les approches tenaient autant des sciences expérimentales que de la philosophie, de la psychanalyse et de l’anthropologie. La défense d’une étude expérimentale qualitative, rendant l’analyse statistique secondaire, fut partagée par un front européen comprenant l’ingénieur-chimiste René Warcollier en France, Tenhaeff à la chaire de Parapsychologie d’Utrecht aux Pays-Bas (fondée en 1953), Bender à la chaire de Psychologie et zones frontalières à Fribourg en Allemagne (début du professorat en 1954), Servadio en Italie et Jung et Pauli en Suisse. Cette approche plus globale portera ses fruits sur le long terme, avec le développement de générations successives de chercheurs conscients des problématiques de la parapsychologie, les abordant avec prudence sous plusieurs angles.
L’approche rhinienne allait devenir davantage dominante après la seconde Guerre Mondiale, profitant de l’aura des Etats-Unis. De plus en plus de chercheurs entraient dans le champ de la parapsychologie et proposaient des protocoles originaux, voire étendaient les méthodes de Rhine à d’autres phénomènes. La Parapsychological Association (PA), groupe visant à professionnaliser la discipline, fit même son entrée à l’American Association for Advancement of Science en 1969. Dans les années 70 et 80, plusieurs universités ouvrirent leurs portes à ces recherches, pressées par la révolution culturelle américaine, particulièrement visible en Californie. D’importantes avancées expérimentales et théoriques furent faites. Lors de la guerre froide, plusieurs programmes successifs d’application militaire de la parapsychologie furent subventionnés aux Etats-Unis, et aboutirent en 1995 à une conclusion admettant la présence d’anomalies mais ne trouvant pas de consensus sur leur interprétation et leur potentielle utilité. Pour diverses raisons, notamment le manque de fonds, la montée d’un scepticisme aussi dogmatique que médiatique, le manque de renouvellement des nouvelles générations, cette bonne situation de la parapsychologie américaine déclina fortement dans les années 90.
Quelques tenants de l’approche de Rhine essaimeront dans d’autres pays : Ramakrishna Rao réussira à monter un département de parapsychologie et psychologie dans une université en Inde en 1967, qui sera plus tard détourné pour des études purement psychologiques ; Vernon Neppe fut le premier africain (d’Afrique du Sud) à devenir full member de la PA en 1983 ; Robert Morris sera nommé à la chaire de Parapsychologie ouverte à Edimbourg en 1985 ; et Mario Varvoglis reprendra en main l’IMI de Paris en 1998.
Depuis les années 90, l’activité de recherche semble s’être déplacée en Europe. De plus en plus de chercheurs parviennent à travailler en milieu universitaire, en particulier au Royaume-Uni, aux Pays-Bas, en Suède et en Allemagne. Si la communauté des parapsychologues ne s’est pas considérablement agrandie, les ressources pour l’enseignement et la formation se sont considérablement accrues. Ainsi, de nombreux étudiants effectuent leur doctorat sur des thèmes touchant à la parapsychologie et ne voient pas les portes de l’Université se refermer pour autant. En effet, paradoxalement, le bon niveau de certains parapsychologues sur le plan méthodologique et épistémologique a permis un effet boule de neige. Par exemple, Robert Morris a supervisé 27 PhD à Edimbourg, dont 18 étudiants travaillent maintenant en milieu universitaire (dont 12 au Royaume Uni). Eux-mêmes supervisent d’autres doctorants qui intègrent à leur tour des unités de recherche académiques (principalement dans les départements de psychologie).
Quant à la recherche en elle-même, elle s’oriente de plus en plus vers des programmes de recherche communs où les protocoles les plus prometteurs font l’objet de critiques et de tentatives de reproductions. Ces travaux sont de plus en plus fréquemment publiés dans des revues mainstream, notamment pour les débats sur les méta-analyses des recherches sur la micro-PK (Radin & Nelson, 1989 ; Bösch, Steinkamp & Boller 2006 ; Radin, Nelson, Dobyns & Houtkooper, 2006); ou celles utilisant le paradigme du Ganzfeld (Bem & Honorton, 1994 ; Milton & Wiseman, 1999 ; Storm & Ertel ; 2001 ; Palmer, 2003). Enfin, en plus du congrès annuel de la Parapsychological Association (PA), un congrès de plus en plus régulier de la section européenne de la PA se focalise sur les débats entre pairs. Le décalage entre les différents pays européens, toujours important, pourrait ainsi tendre à se réduire.

Voyons à présent davantage dans le détail cette évolution actuelle au sein des différents centres de recherche, évolution qui sera reprise de façon plus large dans un travail de synthèse accessible à la fin du livre blanc.

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Synthèse

A partir de l’état des lieux présenté précédemment, il nous a semblé pertinent de faire une synthèse des informations recueillies de façon à dresser un tableau d’ensemble de la recherche parapsychologique actuelle.
Il est notamment possible de décrire le développement de la parapsychologie en découpant des zones plus ou moins développées, car les différences entre chaque zone sont suffisamment importantes pour montrer des profils contrastés. Nous avons ainsi choisi de parler de « pays développés », de « pays émergents » et de « pays en voie de développement » concernant la parapsychologie scientifique. Un chapitre particulier sera consacré aux paradoxes de la parapsychologie aux Etats-Unis.

Les pays développés

La Parapsychological Association compte aujourd’hui environ 300 membres provenant de 30 pays différents. Les pays qui tiennent actuellement le haut du tableau en matière de production d’une recherche de qualité sont le Royaume-Uni, l’Allemagne et le Japon.

Le Royaume-Uni possède en particulier plusieurs unités de recherche implantées en milieu universitaire. Ces unités adoptent à la fois une approche purement parapsychologique, et des approches relevant davantage de la psychologie et de la sociologie. Le niveau de compétence y est élevé, et la structuration en réseau des différentes unités facilite la poursuite de programmes de recherche. Voici la description sommaire de certains de ces lieux de recherche britanniques :

Le foyer de départ est la chaire Koestler de Parapsychologie d’Edimbourg (KPU, http://www.koestler-parapsychology.psy.ed.ac.uk/index.html) occupé jusqu’à sa mort en 2004 par Robert Morris. Celui-ci a supervisé de nombreux doctorants qui ont ensuite intégré des universités et constitué des unités de recherche, généralement dans des départements de psychologie. L’approche implique d’étudier à la fois les hypothèses psi et les hypothèses non-psi, dans un souci de neutralité par rapport à l’objet d’étude. Un cours via Internet a vu le jour en 2008, et il s’agit probablement de l’une des meilleures formations à distance en parapsychologie.

Le Centre de Recherche sur les Processus Psychologiques Anomaux (CSAPP, http://www2.northampton.ac.uk/socialsciences/sshome/csapp) de l’Université de Northampton est le plus grand centre universitaire mondial. Il est composé de chercheurs d’origines variés et conduit notamment des recherches sur les corrélations entre participants lors d’expériences de télépathie ainsi que sur les liens entre le psi et la chance.

L’Unité de Recherche sur les Expériences Anomales (AERU, http://www.york.ac.uk/depts/soci/research/aeru.htm) de l’Université de York a été fondée en 2006 avec une optique différente, puisqu’il s’agit d’étudier le contexte, les caractéristiques et les conséquences d’expériences généralement négligées par les sciences sociales, notamment celles qui suggèrent des processus psychologiques anomaux et des états exceptionnels de conscience. On trouve donc des travaux portant sur les interactions au niveau du langage lors d’expérimentations parapsychologiques, une étude du psi adaptée à une population d’artistes, et une prise en compte des conditions géographiques lors de témoignages de phénomènes spontanées.

L’Unité de Recherche en Psychologie Anomalistique (APRU, http://www.goldsmiths.ac.uk/apru/) du Goldsmith College de Londres est dirigé par un sceptique ouvert, Chris French, qui concentre son étude sur les explications prosaïques des phénomènes psi en se reposant sur la psychologie et la sociologie. Mais cela ne l’empêche pas de collaborer avec le biologiste Rupert Sheldrake pour la reproduction de protocoles ayant censés avoir mise en évidence des phénomènes souvent rapportés par le public, comme le fait de deviner la personne qui appelle au téléphone avant de décrocher ou le fait de savoir lorsqu’une personne regarde la même chose que nous.

Le Groupe de Recherche en Parapsychologie (http://www.hope.ac.uk/parapsychology-research-group/parapsychology-research-group.html) de l’Université de Liverpool Hope est une des deux universités de Liverpool à consacrer des ressources à l’exploration psychologique et parapsychologique de thèmes relatifs au paranormal. Le travail consiste ici à la fois à avoir une approche expérimentale (par exemple avec le protocole de Ganzfeld) et à explorer la phénoménologie de formes particulières d’expériences subjectives (telle que la nature des expériences de guérison psi), ainsi que des études sur le terrain, en particulier sur les lieux de hantises.

L’Unité de Psychologie de la Conscience et Transpersonnelle (CTPU, http://www.ljmu.ac.uk/psychology/80007.htm/) de l’Université John Moores de Liverpool possède une orientation moins expérimentaliste, étudiant les pratiques transformatrices, les mystiques ou encore la synchronicité. En Angleterre, la psychologie transpersonnelle est une discipline reconnue à part entière, et possède par exemple sa propre section au sein de la Société britannique de psychologie.

L’Université d’Hertfordshire (http://www.psy.herts.ac.uk/app-prac-research.html) a hébergé durant neuf ans une unité de recherche financée par des fonds parapsychologiques. Si cette unité a pris fin voilà quelques années, le psychologue sceptique Richard Wiseman qui la dirigeait est toujours présent dans cette Université, et accueille des doctorants travaillant sur la psychologie du paranormal, du mensonge et de la mystification, de l’intuition et du syndrome des faux souvenirs.

Le Groupe d’Etudes Parapsychologiques de l’Université de Coventry (http://www.coventry.ac.uk/courses/course-a-z/a/2007) propose un Master en Parapsychologie, disponible à distance, qui se veut généraliste en introduisant aux domaines empirique, théorique et méthodologique du champ controversé de la parapsychologie.

Le Royaume Uni a donc su accepter l’étude universitaire de la parapsychologie, avec des chercheurs majoritairement issus de la psychologie qui collaborent avec leurs homologues sceptiques. L’étude est diversifiée et devient légitime par le seul fait que ces centres de recherches étudient notamment les expériences spontanées en plus de la question de l’authenticité des phénomènes psi.

L’Allemagne se trouve également dans une situation bien développée. Elle possède le plus important institut privé (L’Institut pour les Zones frontières de la psychologie et l’hygiène mentale, IGPP, http://www.igpp.de), pour une étude multidimensionnelle de la parapsychologie, employant environ 20 personnes. Ce centre perpétue l’approche holiste du professeur Hans Bender tout en s’ouvrant de plus en plus à des recherches « mainstream ». Fondé en 1950, cet organisme a changé de visage dans les années 90 grâce à des fonds privés qui ont permis le développement de programmes de recherche de longue durée. La structure de l’IGPP inclut quatre départements de recherche et deux divisions de services reconnus pour leur excellence au niveau international. Des rapports bisannuels édités depuis 2000 en allemand et anglais permettent de se rendre compte des activités de cet organisme non-lucratif (http://www.igpp.de/english/reports.htm). Parmi les recherches expérimentales récentes, on peut remarquer l’étude d’EEG corrélés chez des sujets spatialement séparés ainsi qu’une expérience de télépathie en Ganzfeld qui dissimule aux participants l’aspect parapsychologique de l’expérience.
Depuis 1981, l’Allemagne possède également une société visant à réunir tous les scientifiques de langue allemande s’intéressant à la parapsychologie, sur le modèle de la Parapsychological Association. La Société Scientifique pour la Promotion de la Parapsychologie (WGFP, http://www.parapsychologische-beratungsstelle.de) est reconnue d’utilité publique et s’applique en particulier à fournir une information fiable au public à travers un service de consultation à Freiburg dirigé par le physicien et psychologue Walter von Lucadou. Ce dernier est un expérimentateur reconnu ayant déduit de ses recherches un modèle théorique (Model of Pragmatic Information) qui a une place importante dans les théorisations actuelles.
Une troisième société, basée à Stuttgart, opte pour une approche « zététique » ou plutôt « anomalistique » telle que définie par le sociologue Marcello Truzzi. La Société pour l’Anomalistique (GfA, http://www.anomalistik.de) réunit la plupart des sceptiques de niveaux universitaires, mais aussi des parapsychologues, pour une collaboration scientifique afin de faire le tri entre ce qui relèverait de la pseudo-science et ce qui serait de la « vraie » science. Mais, contrairement à de nombreux groupes sceptiques dans le monde, cette société applique le même traitement impartial aux sceptiques auto-proclamés. Cette société est d’ailleurs issue d’un schisme avec le plus puissant groupe sceptique allemand dont les pratiques étaient symptomatiques de certaines dérives du scepticisme. La Société pour l’Anomalistique ne conduit pas elle-même de recherches expérimentales mais réalise des analyses critiques, notamment grâce aux outils de la sociologie et de la psychologie.
L’Allemagne est un bel exemple de pays qui entretient un rapport rationnel à l’étude de ces phénomènes, probable conséquence de la bonne éducation du public ayant pour foyer la chaire de Psychologie et des zones frontalières occupée par Bender puis Mischo de 1954 à 2001. Même si l’activité expérimentale n’est pas aussi riche que dans d’autres pays, les parapsychologues peuvent travailler dans de bonnes conditions. Ils contribuent d’ailleurs à un meilleur éclaircissement des modalités sociales et psychologiques du paranormal dans la vie quotidienne, ce qui les met très en avance notamment sur le plan de la prise en charge des personnes vivant avec difficulté des expériences exceptionnelles. On pourra simplement regretter le peu de laboratoires implantés à l’université sur ce thème même sur plusieurs des parapsychologues allemands sont en lien avec des universités.

Le Japon est également un pays dans lequel la parapsychologie est bien développée. Les chercheurs prennent comme objet de recherche prioritaire les énergies subtiles, les processus de guérison anomaux et la psychokinèse. Des études de qualité publiées en japonais et en anglais restent cependant trop isolées des préoccupations des scientifiques occidentaux. Il existe pourtant des opportunités pour des étudiants parlant le japonais, comme un Ph.D. en parapsychologie accessible au Laboratoire de Méta-Parapsychologie du Professeur Masato Ishikawa, de la Graduate School of Information and Communication, à l’Université de Meiji.

L’organisation scientifique japonaise spécialisée dans la parapsychologie la plus connue est la Société Internationale de Science de l’Information Vitale (ISLIS, http://wwwsoc.nii.ac.jp/islis/). Fondée en 1995 à Chiba, cette société est la plus active au Japon. La majorité des membres professionnels d’ISLIS sont des docteurs en ingénierie, en physique et en médecine, qui ont conduit des recherches sur les mécanismes de la Bio-PK. La plupart des protocoles placent des sujets pensant posséder une énergie subtile dans un dispositif bien contrôlé où ils doivent affecter de façon paranormale une cible biologique.

On trouve également au Japon la Société Japonaise pour la Parapsychologie (JSPP, http://wwwsoc.nii.ac.jp/jspp2/). Domiciliée à Tokyo, elle a été fondée pour encourager les activités de recherche en parapsychologie. C’est la plus vieille société de ce type, qui compte aujourd’hui environ 100 membres. Elle a été créée par des universitaires s’intéressant au sujet dans une période où il était possible de choisir son thème de recherche. Son activité parapsychologique est plus générale et moins sophistiquée.

L’Institut de Recherche International (IRI, http://wwwsoc.nii.ac.jp/iri/) quant à lui est une organisation non lucrative, également à Chiba, qui regroupe plusieurs laboratoires de « Bio-émission ». Sont notamment étudiés les mesures des effets de la guérison sans contact en utilisant des biophotons, la bio-PK et le changement de flux sanguin cérébral durant des tâches de clairvoyance ou de PK. Son directeur de recherche, Hideyuki Kokubo, est l’un des chercheurs les plus prolifiques, et c’est également celui qui semble actuellement faire le plus d’efforts pour que les recherches japonaises soient connues au niveau international. On remarquera cependant que la recherche japonaise semble est encore trop insulaire car n’ayant pas assez intégré les approches occidentales.

Les pays émergents

Plusieurs pays peuvent être considérés comme émergents dans le domaine de la parapsychologie : la Suède, l’Argentine, le Brésil et l’Autriche.

La Suède bénéficie de la création d’une chaire d’Hypnose et de Parapsychologie à l’Université de Lund en 2005. Elle est occupée par Etzel Cardeña qui est également l’actuel président de la Parapsychological Association. On remarquera également l’obtention d’un professorat à l’Université de Göteborg par Adrian Parker, un parapsychologue spécialiste du ganzfeld (2007) :

Le centre de recherche le plus important en Suède, correspondant à la chaire d’hypnose et de parapsychologie, a été baptisé Centre de Recherche sur la Conscience et la Psychologie anomale (CERCAP http://www1.psychology.lu.se/Personal/e_cardena/Cercap/CERCAP.htm). Ce centre conduit des recherches sur les frontières de la psychologie (dissociation, hypnose et autres états modifiés de conscience) mais test aussi des sujets psi et les relations entre états modifiés de conscience et psi. La chaire de Lund constitue une opportunité universitaire intéressante pour les étudiants étrangers.

• Le groupe plus réduit de Göteborg (autour d’Adrian Parker, http://www.psy.gu.se/Personal/AdrianParker.htm) propose des innovations pour améliorer le protocole Ganzfeld. La parapsychologie est intégrée à quelques cours dispensés dans le département de psychologie.

• La Suède possède aussi une Société Suédoise pour la Recherche Parapsychologique (SPR Suédoise, http://parapsykologi.se/) qui fait davantage office d’interface avec le grand public.

La Suède devrait très probablement pouvoir être classée dans le groupe des pays développés dans les quelques années à venir avec la formation de nouveaux étudiants et la multiplication des centres de recherche qui semble en cours sur le même modèle que celui du Royaume-Uni.

L’Argentine a également su développer un organisme de qualité concernant la parapsychologie, l’Institut de Psychologie Paranormale (IPP, Buenos Aires, http://www.alipsi.com.ar/) dirigé par Alejandro Parra, qui fédère au niveau sud-américain tout en étant bien reconnu au niveau mondial. L’Institut a su s’imposer comme interlocuteur lors d’un questionnement de la population argentine à l’occasion de la sortie en salles du film « Sixième sens ». Parra posséde également une large culture parapsychologique et a publié un ouvrage sur l’histoire, déjà riche, de la parapsychologie en Argentine. En plus d’un accueil clinique pour le public, et toutes les fonctions d’une société savante, l’Institut assure un travail d’enseignement et de recherche, à la fois par des études psychologiques et parapsychologiques. Une étude originale portait récemment sur des tests de « psychométrie » (ESP utilisant des « objets-relais »). Néanmoins, la présence de l’Institut semble peser bien peu par rapport à la taille du territoire argentin et face à la prolifération des sociétés non-savantes s’occupant de paranormal.

Le Brésil se développe de façon similaire avec diverses sociétés réparties sur le territoire, et qui arrivent progressivement à s’extraire des groupes spirites pour proposer soit une approche académique (par exemple avec Fatima Regina Machado et Wellington Zangari), soit une approche expérimentale dans le laboratoire du Centre Intégré de Parapsychologie Expérimentale dirigé par Fabio Eduardo Da Silva. La plupart de ces groupes comme le Centre Latino-américain de Parapsychologie (CLAP, São Paulo, http://www.clap.org.br/) ou l’Institut Pernambuco de Recherche Psychobiophysique (IPPP, Recife, http://www.parapsicologia.org.br/) s’occupent principalement de l’éducation du public. Quant au Centre Intégré de Parapsychologie Expérimentale (ICEP, http://unibem.br/cipe/1_cipe/1_index.htm) de Curitiba, il semble le plus actif sur le plan expérimental. Des bourses de la Fondation Bial ont été obtenues pour des études sur le Ganzfeld reproduisant en partie les protocoles antérieurs. Mais cette nouvelle structure, créée en 2002, inclut aussi des laboratoires de DMILS (Direct Mental Influence on Living Systems) et de Micro-PK. Des collaborations ont même été entreprises avec des chercheurs japonais, notamment sur l’étude des guérisseurs. En plus de cette activité de recherche, des cours sont assurés (bien que non encore reconnus par l’Etat) et un « Psi Meeting » annuel réunit des chercheurs du monde entier et se conclut par la publication des actes du congrès. Un problème reste cependant que l’ICEP est une antenne d’un Collège spirite, et que la séparation entre croyance et science n’est pas encore suffisamment établie.

Enfin, on remarquera dans le groupe des pays émergents l’Autriche. Elle possède une société compétente en matière d’éducation en parapsychologie menant à des réalisations expérimentales de bonne qualité chez de jeunes chercheurs en milieu universitaire. La Société Autrichienne pour la Parapsychologie et Zones Frontières de la Psychologie de Vienne (http://parapsychologie.ac.at/index.htm) a été fondée en 1927. Son histoire riche lui assure une place de référent scientifique pour l’Autriche. Son local se trouve à l’Université de Vienne (Institut pour l’anthropologie culturelle et sociale). La société compte maintenant près de 200 membres, ainsi que 200 autres membres associés. Elle a accueilli le 47ème Congrès Annuel de la Parapsychological Association en 2004. Les récentes recherches d’Alexander Batthyany, qui a reproduit et amélioré les recherches sur l’habituation précognitive, est le meilleur exemple de cette émergence. On remarquera également les travaux Ronald Weigl qui intègre des modèles théoriques comme le MPI pour une expérience couplant Ganzfeld et Remote Staring. La Société en elle-même vient aussi de produire des expériences informatisées d’ESP utilisant des sujets émotionnellement liés. Mais il est difficile de savoir si des opportunités de carrière s’ouvriront pour ces jeunes chercheurs autrichiens et c’est probablement en fonction de cela que dépendra le futur de la parapsychologie en Autriche.

Le paradoxe des Etats-Unis

Alors que la parapsychologie scientifique a connu une explosion aux Etats-Unis dans les années 70 et 80, le mouvement semble maintenant à bout de souffle. De nombreuses sociétés se sont réorientées vers les « consciousness studies » et des approches transpersonnelles associant études de la spiritualité et de ses corrélats empiriques.

Le Laboratoire de Sciences Cognitives (CSL, http://www.lfr.org/LFR/csl/) dirigé par le physicien Edwin May produit des travaux de très bon niveau dans un cadre physicaliste. Pendant environ 20 ans, le CSL a été le centre de recherche parapsychologique sponsorisé par le gouvernement américain pour effectuer le programme secret connu récemment sous le nom de Stargate. Cependant, les fonds se font plus rares depuis la fin du programme, et c’est aussi pour cela que le CSL n’a pour visée que la recherche, et moins l’éducation du public ou des jeunes chercheurs. Les travaux sur les cognitions et perturbations anomales viennent étayer des modèles théoriques comme la Decision Augmentation Theory.

L’Institut frontalier (BI, Saratoga, http://www.boundaryinstitute.org/) réunit lui-aussi une majorité de physiciens. Leurs expériences portent sur la rétrocausalité, l’aléatoire quantique et la micro-psychokinèse. Le BI est connu pour ses expériences psi en ligne (gotpsi.org) mais le manque de moyens n’a pas permis de réaliser jusqu’aà présent les analyses de toutes les données produites quotidiennement.

L’Institut des Sciences Noétiques (IONS, http://www.noetics.org/) en Californie allie science et spiritualité dans un mélange courant aux Etats-Unis, mais qui s’exporte mal. Il a été fondé en 1973 par le célèbre astronaute Edgar Mitchell, dont les récentes déclarations sur la présence d’extra-terrestres sur Terre ont laissé les médias perplexes. Cela entrave un peu la crédibilité des recherches qui peuvent y être menées. Les expériences parapsychologiques réalisées par Dean Radin ou Marylin Schlitz ont régulièrement mené à des résultats significatifs, en dépit des difficultés de réplication couramment rencontrées en parapsychologie. Malheureusement, les conclusions des rapports scientifiques sont récupérées pour la promotion d’une « réalité plus large » et d’applications pratiques qui semblent prématurées.

La Division des Etudes Perceptuelles (DOPS, Charlottesville, http://www.healthsystem.virginia.edu/internet/personalitystudies) est une unité du département de médecine psychiatrique de l’Université du système de santé de Virginie. Elle a été fondée en 1967, lorsque le Dr Ian Stevenson quitta la chaire du département de psychiatrie pour devenir directeur de la division et professeur à la chaire Chester F. Carlson de psychiatrie, positions qu’il a conservées durant 35 ans. La DOPS est aujourd’hui dirigée par Bruce Greyson, un spécialiste des Expériences de Mort Imminente, et inclut plusieurs parapsychologues reconnus. A l’inverse du CSL et du BI, dont l’approche se situe dans le giron des sciences exactes, la DOPS n’adopte pas une démarche expérimentale mais recueil des cas spontanés et les analyses sous l’angle sociologique, psychologique et historique.

Le Centre de Recherche Rhine (RRC, Durham, http://www.rhine.org/main.shtml) continue la mission et l’œuvre du Laboratoire de Parapsychologie de l’Université de Durham et de la Fondation pour la Recherche de la Nature de l’Homme, deux organismes anciennement dirigés par J.B. et Louisa Rhine. La secrétaire actuelle n’est autre que la fille des Rhine, Sally Rhine-Feather. Des initiatives sont prises en matière d’éducation (avec une université d’été) et dans la lignée de protocoles originaux, sans égaler encore le niveau des activités expérimentales de ses prédécesseurs. Le RRC publie néanmoins le Journal of Parapsychology, une revue professionnelle existant depuis 1937.

L’Institut de Psychologie Transpersonnelle (ITP, Palo Alto, http://www.itp.edu/) n’est pas spécifiquement une société de parapsychologie, mais il se situe à sa frontière directe. Son directeur de recherche n’est autre que William Braud, qui conduit des expériences sur l’influence mentale à distance.

Les Laboratoires Internationaux de Recherche sur la Conscience (ICRL, Princeton, http://www.icrl.org/home/index.php) sont un consortium interdisciplinaire pour des universitaires, la plupart ayant été associés avec le célèbre laboratoire du Princeton Engineering Anomalies Research (PEAR) en tant que collaborateurs internes ou ponctuels durant les 30 ans de son histoire. La recherche qui y est conduite ne se définit pas comme « parapsychologique », et peut d’ailleurs côtoyer d’autres disciplines. Présidés par Brenda Dunne, qui fut manager du laboratoire du PEAR de son tout début en 1979 jusqu’à sa fermeture en 2007, les ICRL permettent d’étendre le travail du PEAR dans un plus large champ d’enquête.

L’Ecole académique et centre de recherche de Saybrook (San Francisco, http://www.saybrook.edu) représente une version « californienne » de la parapsychologie, influencée par des pratiques considérées en France comme « New age ». L’Ecole de Saybrook est néanmoins reconnue comme une plateforme de la psychologie humaniste qui se présente comme une troisième force de la psychologie (après le cognitivisme et la psychanalyse). Récemment, une recherche sur la guérison à distance a été menée qui utilisait un IRMf. Mais ces travaux semblent récupérés au sein même de l’établissement dans un discours sur la toute puissance de l’intention.

Il faut aussi compter sur l’American SPR (New York, http://aspr.com/), la Parapsychological Association (Columbus, http://parapsych.org/), la Society for Scientific Exploration (SSE, http://www.scientificexploration.org/) et la Parapsychology Foundation (New York, http://pflyceum.org/7.html), dont les activités de publications de revues spécialisées, de financement de recherches, d’organisation de congrès et d’information auprès du public en font des référents pour le monde entier. Cependant, elles fonctionnent de façon non lucrative et selon des fonds limités. Si elles facilitent la conduite et la diffusion des recherches parapsychologiques, elles n’en sont pas les productrices.

Les paradoxes des Etats-Unis consistent dans cet éclatement des sociétés savantes dont aucune ne parvient à véritablement adopter une approche globale et neutre de la parapsychologie (hormis la Parapsychological Association). Les fonds et moyens alloués à ces sociétés semblent d’autant plus importants que l’objectif affiché est de ne pas faire de parapsychologie expérimentale. Alors que de nombreuses universités américaines accueillaient auparavant ces questionnements, ce n’est plus le cas aujourd’hui. Les rares universités offrant des opportunités pour étudier les « consciousness studies » ou la psychologie transpersonnelle ont répondu, lorsqu’elles ont été contactées, qu’elles ne voulaient rien à voir à faire avec la parapsychologie. La réputation du domaine est donc assez mauvaise actuellement.

Les pays en voie de développement

De nombreux autres pays n’ont pas les ressources et la visibilité suffisante pour être à la pointe des recherches. Leurs activités sont plus de nature éducatives et critiques, ce qui permet de diffuser localement des informations sur le domaine. Il faut porter attention à ces « petits pays » de la parapsychologie car les chercheurs brillent généralement par l’originalité des protocoles qu’ils proposent. On peut classer dans cette catégorie l’Australie, le Canada, le Danemark, la France, la Hongrie, l’Italie, et les Pays-Bas.

L’Australie a accueilli plusieurs cours de parapsychologie à l’université, avec des spécialistes de la psychologie de la croyance au paranormal et de l’éducation à la parapsychologie. L’organisme fédérateur est l’Institut Australien de Recherche Parapsychologique (AIPR, Gladesville, http://www.aiprinc.org/) qui publie l’Australian Journal of Parapsychology.

Le Canada anglophone ne semble pas posséder de véritables référents, mais on y croise un grand nombre de groupes de « chasseurs de fantômes » amateurs ainsi que plusieurs sceptiques de niveau universitaire. Le Québec possède une Société Québécoise de Psilogie (Montréal, http://sqp.qc.ca) qui reste malheureusement méconnue, même localement, et se fait vieillissante.

Le Danemark possède une très ancienne Société Danoise de Recherche Psychique (SPF, København, http://parapsykologi.dk). Durant ses cents années de vie, la société a eu une vie plutôt turbulente. De 1987 à 1999, elle était même tombée dans le New Age et ses membres scientifiques avaient démissionné. Néanmoins, en 1999, une toute nouvelle équipe fut élue et commença immédiatement un long et difficile travail pour restaurer le profil scientifique et la confiance en la société. La bibliothèque, presque perdue, fut sécurisée. Des ressources furent allouées à l’éducation du public avec pour objectif premier le respect de l’héritage de cette société scientifique. Grâce à l’aide apportée par la chaire d’hypnose et parapsychologie de Lund au Sud de la Suède, la SPF accueille de plus en plus d’intervenants de qualité mais ne conduit pas encore de recherches elle-même.

En France, L’Institut Métapsychique International de Paris (IMI, https://www.metapsychique.org), fondé en 1919, avait connu une période de creux similaire dans les années 90, notamment dû à un manque de fonds. L’accession à la présidence en 1998 de Mario Varvoglis a permis la constitution d’une nouvelle équipe scientifique. Ses réalisations furent nombreuses durant la dernière décennie : organisation de plusieurs congrès internationaux, création d’un groupe pour les étudiants et d’un service de consultation psychologique, organisation de conférences, publications de nombreux livres et articles… Quelques recherches expérimentales furent également menées, et d’autres sont en préparation. Cependant, la parapsychologie française reste quasiment absente du paysage universitaire en français (hormis l’Unité de Valeur de Paul-Louis Rabeyron à l’Université Catholique de Lyon).

La Hongrie possède une activité de recherche et d’éducation à la parapsychologie grâce au physicien Zoltán Vassy (vassyz@freemail.hu). Celui-ci a à la fois co-fondé le plus important groupe sceptique hongrois et l’association RACIO, hébergée par le Center for Affective Psychology de l’Université Eötvös Loránd de Budapest, qui mène quelques expérimentations informatisées sur des phénomènes parapsychologiques.

On trouve plusieurs sociétés scientifiques s’occupant de parapsychologie en Italie, mais des guerres fraternelles les opposent depuis des décennies. L’organisation de recherches systématiques en est rendue difficile. On note cependant la rigueur du Centre d’Etudes Parapsychologiques (CSP, Bologne, http://digilander.libero.it/cspbologna/) qui publie deux fois par an le Quaderni di Parapsicologia ; l’Association Italienne de Science Métapsychique (AISM, Milan, http://www.metapsichica.it/) ; ou encore « Il laboratorio » (Bologne, http://xoomer.alice.it/laboratorio26/home.htm). D’autres chercheurs, généralement issus des sciences humaines, sont dispersés dans toute l’Italie.

Pour les Pays-Bas, il existe une activité parapsychologique en milieu universitaire à Utrecht et Amsterdam, dont la figure la plus connue est le physicien et psychologue Dick Bierman. Celui-ci poursuit de nombreuses études sur les états de conscience modifiés et le psi, en utilisant les protocoles et les instruments des neurosciences et de la psychologie cognitive. Il dispense également des cours, notamment des formations à distance. Néanmoins son activité reste assez isolée aux Pays-Bas, alors qu’une imposante tradition de recherche s’inscrit dans l’histoire de ce pays qui a connu en 1953 la création de la première chaire européenne dédiée à la parapsychologie à Utrecht.

Il existe aussi de nombreux autres pays où il n’y a pas de société de référence pour la parapsychologie scientifique, mais des chercheurs isolés ou des volontaires n’ayant pas suffisamment accès aux informations scientifiques concernant ce domaine. On peut les signaler car ces pays restent intéressants pour avoir su par le passé produire des recherches de qualité, et parce qu’ils le pourront peut-être encore. Voici quelques exemples de ces pays où beaucoup reste à faire : l’Espagne, la Grèce, la Suisse, l’Inde, la Turquie et l’Ukraine.

Enfin, dans certains pays se dressent des obstacles de type politique qui obligent les chercheurs à rester discret, notamment en Russie (ex-URSS) et en Chine. Dans ce dernier pays, l’étude des enfants ayant des capacités psi, connue sous le nom de « recherche sur les fonctions exceptionnelles du corps humain », avait débuté en 1978. C’était une période propice, après le chaos de la Révolution culturelle et avant le commencement de la réforme économique. Les intellectuels chinois exerçaient alors leur liberté dans le choix de leur sujet d’étude. Des centaines d’enfants se pensant doués de capacités parapsychologiques se manifestèrent à la suite de la diffusion d’un film documentaire, et près de 500 universitaires les étudièrent dans plus de 100 centres de recherche. Des articles furent publiés dans Ziran Zazhi, l’équivalent chinois de Nature, qui évaluaient que 50 % des enfants de 10 ans présentaient de telles capacités (Cheng et al., 1979 ; He et al., 1980). Cela participa au culte local de l’enfant, dont le contrôle des naissances renforçait l’aspect d’exceptionnalité. Ces études ouvrirent aussi la Chine à des recherches mondiales dont elle avait été isolée pendant un siècle. Finalement, le Parti Communiste arbitra la question en 1982 (Zha & McConnell, 1991) : ces « fonctions exceptionnelles du corps humain » n’étaient pas un objet de recherche officielle, et leur étude devait donc se faire ailleurs que dans les institutions et la presse scientifiques. Il fut seulement autorisé à une minorité de savants de poursuivre leurs recherches à condition qu’ils les publient dans des bulletins à usage interne.

Conclusion

Au sortir de ce recensement, il est difficile de déterminer si la parapsychologie est sur une bonne ou une mauvaise pente. La situation actuelle varie en effet grandement selon les pays. Seul le Royaume-Uni, sous l’impact du travail de feu Robert Morris, à la chaire Koestler d’Edimbourg, semble avoir atteint une certaine maturité sur le plan de la recherche universitaire avec plusieurs générations successives de chercheurs bien implantés au niveau académique. L’Allemagne semble également, par le biais de l’IGPP en particulier, avoir développé des approches théoriques et cliniques de qualité même si elles sont moins présentes sur le plan universitaire qu’au Royaume-Uni. Quant au Japon, malgré des travaux de qualités sur la Bio-PK, il semble encore trop isolé de la recherche internationale.

Le développement actuel de la parapsychologie reste donc complexe et certains pays ayant auparavant une recherche de pointe sur ces questions, tels les Etats-Unis, semblent être à présent dans une période de recession pour ce type de recherche. Il s’agit probablement de la conséquence des difficultés rencontrées par les parapsychologues qui restent globalement les mêmes depuis la Deuxième Guerre mondiale : la trop grande hétérogénéité du niveau de la recherche et des expérimentations, les problèmes de reproductibilité, l’absence d’explications sur le plan physique et le manque de modèles théoriques testables. Les chercheurs en milieu universitaire sont donc souvent dans une situation difficile, d’autant plus que la parapsychologie reste l’objet d’une importante désinformation et que les travaux sérieux qu’elle peut produire sont mal diffusés auprès de la communauté scientifique. Cela conduit à une certaine méfiance envers la parapsychologie qui n’est pas toujours dénuée de fondements. Le niveau des organisations et des chercheurs recensés est en effet très variable. On remarquera également la grande variabilité de niveau et d’activité parmi les organismes privés, dépendants des financements de mécènes.

Cependant, cette situation pourrait évoluer favorablement avec des approches parapsychologiques liées à des questionnements plus généraux en psychologie (l’approche clinique des expériences exceptionnelles ou l’étude des états modifiés de conscience, pour donner deux exemples). Il semble effectivement que la parapsychologie soit en mesure de se développer et de permettre à de jeunes chercheurs de rester à l’université lorsqu’ils associent la parapsychologie avec des approches classiques. Mais cela conduit en même temps à une recherche parapsychologique qui aborde moins frontalement la question de l’authenticité du psi et de ses mécanismes. Ceci explique peut-être aussi le peu de chercheurs en physique dans la nouvelle génération. Sur ce plan, seule l’Allemagne semble à l’heure actuelle être en mesure de produire une recherche qui tient vraiment compte à la fois de la psychologie et de la physique.

Ainsi, la parapsychologie, que ce soit au sein d’organismes privés ou d’universités, reste dans une situation précaire qui permet cependant la production de recherches, comme en témoignent les actes annuels du congrès de la Parapsychological Association. C’est probablement en fonction de la qualité et de l’originalité des travaux que produiront la quarantaine d’organismes que nous avons recensés (dont une quinzaine en milieu universitaire) que la situation de la parapsychologie évoluera favorablement ou non.

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