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Les séances « spirites » du Cuarto de Luz

Les séances « spirites » du Cuarto de Luz

Au milieu de l’année 2002, l’IMI fut prévenu du prochain séjour en France de certains médiums de confession spirite originaires du Mexique. L’écrivain Didier Van Cauweleart et le Père François Brune avaient assisté à des séances organisées par ces médiums dans leur pays et témoignaient avoir constaté des phénomènes pouvant intéresser l’Institut. Quelques uns des membres de notre Comité Directeur furent cordialement invités, à titre privé, à rencontrer ces médiums pendant leur séjour à Paris, en septembre 2002, dans le but d’organiser quelques séances.


L’Institut Métapsychique International est le principal institut scientifique français à s’être penché sur les phénomènes dits « parapsychologiques » ou « métapsychiques ». L’observation systématique, aussi méthodique que possible, de ces phénomènes fit l’objet de nombreuses publications, notamment dans la Revue Métapsychique, à partir des années 1920. L’IMI étudia entre autres, sous la direction du Dr. Geley puis du Dr. Osty jusque dans les années 1930, les capacités « paranormales » de certains médiums de confession spirite, célèbres à cette époque où le spiritisme était largement répandu dans les pays européens.

L’annonce que des médiums mexicains « à effets physiques » (nous entendons par là des effets potentiellement constatables et mesurables par les outils de la science) pouvaient être observés à Paris, de nos jours, était une nouvelle que l’Institut ne pouvait ignorer et qui a naturellement attisé la curiosité de ses membres. L’un des membres du Comité Directeur, la psychanalyste Djohar Si Ahmed, proposa aux organisateurs de ces séances (messieurs Van Cauweleart, Dray et Brune) d’accueillir les séances à titre gracieux dans les locaux de son institut parisien, l’ICLP (15 rue Bargue, 75015 Paris). Cette proposition fut émise librement et spontanément par Djohar Si Ahmed, à titre personnel, l’ICLP n’ayant aucunement participé ni à l’organisation ni à la tenue des 4 séances de « cuarto de luz » : il ne s’agissait que de prêter des locaux justement disponibles le week-end où se sont tenues les séances.

L’assemblée de la séance du 18 septembre se composait d’une trentaine de personnes, incluant des chercheurs, des médecins, des journalistes et un illusionniste. Tous curieux et apparemment dans des dispositions favorables au bon déroulement de la séance. Parmi les participants, Mario Varvoglis, président de l’IMI, et Francis Mobio, son secrétaire. Tous deux étaient venus à titre amical et par curiosité personnelle, il ne furent pas présentés au reste de l’assemblée comme représentants officiels de l’IMI.

(Deux autres membres de l’Institut, Djohar Si Ahmed et Paul-Louis Rabeyron, venus à titre personnel eux aussi, assistèrent à la séance du lundi 21 septembre).

Ce qui suit est une recension de la première séance rédigée d’après les récits de MM. Varvoglis et Mobio.

Après nous être entendus sur le protocole des médiums mexicains (tous vêtus de blanc, « purification » en passant au-dessus d’un brasero, etc.), nous prenons place dans la salle obscurcie par des tentures aux fenêtres. Assis en demi-cercle, les uns à coté des autres, en nous tenant les mains (si la chaîne était brisée, le médium « risquait de mourrir » précisa M. Dray), nous tentâmes collectivement, à l’incitation de Messieurs Dray et Van Cauwelaert, de créer dans la joie, la musique et la bonne humeur une atmosphère ludique qu’on nous affirmait nécessaire à la manifestation des phénomènes (ce détail rejoint certaines traditions des séances spirites, où les esprits exigeaient la décontraction ou la distraction de l’assistance, afin de pouvoir se manifester pleinement).

Après un laps de temps difficile à estimer compte tenu des conditions imposées (obscurité totale et absence de repères temporels), des sons furent perçus par l’assemblée. Tout d’abord, ce furent des bruits d’enfants qui manipulaient, au niveau du sol, divers jouets qui avaient été posés au centre de la pièce (une pistolet laser à effets lumineux, un hochet, un ballon). Puis apparut une entité présentée par Monsieur Dray comme la réminiscence d’un jeune révolutionnaire mexicain qui serait le fiancé, dans l’autre monde, de sa défunte fille, Carine.

L’entité s’exprimait par le truchement d’un harmonica, créant de la sorte un échange musical avec le public qui participait grandement à l’atmosphère de jeu qui régnait à ce moment.

Puis nous assistâmes à l’appartion d’une autre entité, d’origine amérindienne d’après le commentaire de M. Dray, qui ponctuait ses interventions de puissants roulements de tambour, émis de différents points de la pièce.

Entra finalement en scène celui qui fut annoncé par M. Dray comme « l’esprit Amajur ». Deux parties de son corps étaient clairement lumineuses, ses mains qui étaient visiblement gantées (on distinguait la maille des gants) et la boucle de la ceinture. La lumière émise, fluorescente et de couleur verte, s’accompagnait d’une forte odeur proche du phosphore ou peut-être du soufre. La substance brillante était visiblement visqueuse, peut-être liquide, en tout cas tellement terrestre qu’elle laissa de nombreuses taches ou gouttes, aussi bien sur le sol que sur les vêtements et la peau de plusieurs participants.

L’un des membres de l’assemblée prit alors une photographie (sans flash) de « l’esprit Amajur », ce qui permit à certains d’entre nous d’apercevoir les vêtements tout aussi terrestres de l’apparition (un pantalon faisant penser à un jean et des chaussures), émergeant d’une aube de tulle (sans doute de couleur blanche) qui recouvrait la silhouette. Pendant la prise de la photographie, une source lumineuse plus intense, extérieure à l’entité (peut-être un témoin lumineux émanant de l’appareil photo), permit à six personnes au moins de constater la disparition du medium du fauteuil qui lui était attribué. Notons que le médium, un certain Samuel, était le seul de toute l’assemblée à ne pas avoir à faire la « chaîne ». Il était, une fois dans le noir, tout à fait libre de ses mouvements.

Ce dernier point – l’absence d’entraves du médium et sa chaise aperçue vide au milieu de la séance – nous semble particulièrement important puisqu’il suggère fortement que l’entité  » Amajur  » et le médium Samuel ne sont en réalité qu’une seule et même personne.

Ce constat, qui vint s’ajouter à un faisceau d’autres éléments suspects, a laissé plusieurs d’entre nous particulièrement sceptiques sur l’authenticité des phénomènes observés. Outre la totale liberté de mouvements du médium, l’obscurité était complète et aucun dispositif de surveillance (caméra thermique, faisceaux de rayons infra-rouge liés à un système de sécurité, ou plus simplement farine disposée sur le sol pour constater d’éventuelles traces de pas) ne fut mis en place lors des séances.

Certes, nous ne sommes pas censés ignorer le rôle du « rituel », de la « mise en scène » (qu’il ne faut pas confondre avec la simple fraude) destinée à favoriser la manifestation de certains phénomènes psi. Un complexe appareillage magico-religieux fait de symboles, rituels, chants, objets, se trouve mobilisé systématiquement dans les dispositifs magiques des cultures traditionnelles (chamanisme, tarentisme, etc.). Elles contribuent à la modification des états de conscience, et pourraient créer ainsi un état propice à la manifestation de phénomènes psychologiques ou physiques intéressant la métapsychique.

Quoi qu’il en soit, dans le cas qui nous intéresse ici, rien ne peut nous permettre d’affirmer que des phénomènes paranormaux ont réllement eu lieu. Au contraire, nous sommes enclin à penser que nous avons été spectateurs, tout au long de la séance, d’une série de sons, de lumières et de contacts physiques (l’esprit touchait parfois des personnes) dont la nature ne relève pas de la phénoménologie métapsychique et se rattache plus à du prosélytisme spirite.

Pour conclure, il ne nous est nullement possible d’accréditer l’authenticité de ce dont nous avons été témoins, lors de la séance du vendredi 18 septembre 2002 à Paris.