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Hantise : comment réagir si cela vous arrive ?

Hantise : comment réagir si cela vous arrive ?

Chacun de nous est susceptible d’être confronté, à un moment ou à un autre de son existence, à des situations étranges, à des phénomènes qui semblent défier l’entendement, à des événements paraissant tellement impossibles qu’il devient difficile de faire encore confiance à ses sens.


(Ce texte est tiré de l’ouvrage de Pascale Catala, Apparitions et Hantises, paru aux Presses du Châtelet en 2004.)

Que doit-on faire quand nos yeux voient des êtres qui n’existent pas, quand nos oreilles entendent des bruits sans cause apparente, quand les objets ne semblent plus obéir aux lois de la pesanteur ? Comment affronter alors ces situations, qui peuvent sembler inquiétantes à certains ? Il n’y a encore malheureusement aucune réponse simple. Il subsiste dans ce domaine beaucoup d’incertitudes et de questionnements, et nul ne peut prétendre avoir trouvé LA clé du mystère. Tout au plus peut-on dispenser quelques mises en garde, élaborées par la réflexion sur des exemples vécus. L’étude scientifique de ces sujets depuis un siècle a permis d’accumuler des connaissances utiles pour prendre un peu de recul par rapport à ces faits incroyables et les aborder avec davantage de sérénité.

Hantises et poltergeists : qui appeler ?

Hormis les cas particuliers où une famille emménage dans une vieille demeure lugubre, ce qui peut contribuer à une préparation psychologique, les phénomènes surviennent de façon inopinée. La première réaction est donc la surprise. Puis on tente une action pratique : mettre de la mort-aux-rats dans le grenier si l’on entend des bruits, ranger le contenu d’une armoire si les portes de celle-ci se sont ouvertes sans raison et si les vêtements sont tombés à terre, rajouter un chauffage si des courants d’air glacés envahissent les couloirs, etc. Si les événements perturbateurs subsistent et s’amplifient, on commence à prendre peur. Enfin, devant les dégâts à répétition et les nuisances causées, on ressent une grande lassitude. Parfois, les agitations nocturnes troublent le sommeil, et l’on tombe malade. C’est alors que l’on décide de faire intervenir des personnes extérieures pour tenter de faire cesser les phénomènes.

En général, les curieux accourent de toutes parts : voisins, amis, famille, journalistes… Au début, il peut être rassurant de faire constater le caractère étrange des manifestations par des personnes extérieures à la famille. On y voit un moyen d’objectiver les phénomènes, de faire partager la perception des anomalies, de se rassurer sur le bon fonctionnement de ses propres sens, d’éloigner l’hypothèse des hallucinations.

Je conseillerai pour ma part de repousser au bout d’un moment les curieux s’ils arrivent en trop grand nombre, et surtout d’éviter au maximum les journalistes qui ne pourront qu’accroître la confusion. C’est souvent la médiatisation exagérée qui occasionne le plus de dommages aux victimes de poltergeists.

Les exorcistes

La question se pose alors, face à la situation d’urgence : qui appeler ? Naguère, c’était aux prêtres que l’on pensait tout d’abord. Il est effectivement quelquefois souhaitable, dans des milieux à forte croyance religieuse, de faire venir un homme de foi sur les lieux : prêtre catholique, rabbin, marabout, etc., correspondant au contexte culturel et ethnique du groupe. Les demandes d’exorcisme* sont encore aujourd’hui très courantes, et le nombre de prêtres catholiques qui ont la qualification d’exorcistes est très restreint. Ceux-ci sont assaillis d’innombrables appels à l’aide qu’ils ont le plus grand mal à satisfaire. Ces demandes consistent surtout en une attente d’intervention « magique », que les prêtres ne se sentent pas habilités à effectuer, car ils se sentent avant tout hommes de Dieu. Très instruits en psychologie et en sciences humaines en général, ils conçoivent surtout leur rôle comme celui d’un pédagogue chargé de rappeler aux chrétiens égarés le chemin de la foi. Ils sont donc très réticents quand on leur parle d’attaques de démons ou de Satan. Il est ainsi très rare qu’ils procèdent à un réel rituel d’exorcisme, et engagent plutôt les gens à la prière.

Pour toutes ces raisons, lorsque l’on tient vraiment à un exorcisme, on fait souvent appel à une personnalité locale, même si elle n’est pas dotée des qualifications nécessaires. L’ecclésiastique pourra alors prononcer un rituel censé faire cesser le phénomène gênant. Il apportera des « talismans », des médailles de saint Benoît, des flacons d’eau bénite, des crucifix, ou des icônes. Parfois, ces rituels auront un effet positif et les problèmes disparaîtront ou s’atténueront ; pour moi, cet effet est dû en grande partie à l’impact psychologique du rituel sur le groupe. Dans le cas contraire, ou si la famille n’est pas religieuse, il faudra se tourner vers d’autres intervenants. Et c’est là que s’annonce le danger.

Attention aux escrocs !

Il convient de rester très prudent quant à la personne que l’on appellera à l’aide. Il faut savoir que ce sont souvent des religieux défroqués ou marginaux qui proposent des exorcismes, et certains d’entre eux sont douteux.

Traditionnellement, surtout en milieu rural, on fait également appel pour résoudre ce genre de problèmes, à des magnétiseurs, des voyants, des guérisseurs, des sourciers, des désenvoûteurs, des médiums de toute sorte… Ce sont en général des personnes qui se prétendent « professionnels du paranormal » et quelquefois « sensibles aux esprits maléfiques ou aux mauvaises ondes ». Les médiums* détecteront peut-être dans la maison des lieux « chargés » où des drames se seraient déroulés. Des « ghostbusters »* professionnels proposeront peut-être de venir inspecter les lieux avec un appareillage spécial, censé également repousser efficacement les mauvaises influences. Je recommanderai à cet égard la plus extrême prudence, pour ne pas tomber aux mains d’escrocs qui n’hésiteront pas à profiter du désarroi des familles pour leur extorquer de grosses sommes d’argent. Il faut savoir qu’il n’existe à l’heure actuelle AUCUN appareil technique susceptible d’agir efficacement contre les hantises et poltergeists. Un technicien peut éventuellement vérifier, à l’aide de matériel standard, si le local n’est pas saturé d’ondes électromagnétiques, s’il y a eu des variations de température, d’hygrométrie, etc., expliquant des bruits. Mais personne ne peut prétendre avoir inventé un appareil à chasser les fantômes, ni à capter les « ondes psychiques néfastes ».

C’est pourquoi, à moins que le praticien ne soit une personne digne de confiance qui ne demande pas, ou très peu, de rémunération, comme par exemple un guérisseur local, il vaut mieux s’abstenir de recourir à ce genre de services. Des familles ont été ainsi délestées peu à peu de toutes leurs économies par des charlatans qui avaient réussi à établir une relation d’emprise. Ils les avaient persuadées qu’elles étaient envoûtées ou ensorcelées, à la merci d’un mauvais esprit très dangereux. Ils avaient prétendu que seuls des rituels secrets (connus d’eux seuls) permettraient de les protéger ou de les libérer, que ces rituels étaient si périlleux qu’ils ne pouvaient accepter de les effectuer qu’en échange de sommes d’argent de plus en plus importantes, etc. Insidieusement, les familles se sont laissées progressivement terroriser et ne voyaient plus d’autre issue que de payer.

Par ailleurs, certaines sectes peuvent également essayer de tirer profit de situations de vulnérabilité de familles désemparées devant le paranormal. Vous pouvez être conviés par exemple à des réunions où l’on vous présentera des personnes qui auront « les mêmes problèmes que vous ». Soulagés de trouver des oreilles compréhensives, vous vous épancherez, donnant ainsi aux responsables de précieux renseignements, qu’ils réutiliseront à des fins de manipulation psychologique. Il vaut donc mieux se tenir à l’écart de tels groupements.

L’aide de la police

Il est toujours possible, si l’on ne craint pas les qu’en dira-t-on ou les sourires en coin, de porter plainte auprès de la police ou de la gendarmerie. Dans les campagnes, il n’est pas rare que les familles portent plainte contre un voisin qu’elles suspectent être responsable des troubles. Si l’on n’a pas de soupçons particuliers, il est recommandé de porter plainte contre X, afin de déclencher une enquête. Il peut arriver évidemment que l’on ne soit pas pris au sérieux étant donné le caractère souvent extravagant des faits observés. Dans ce cas l’intervention de la presse peut amener à une considération plus attentive des problèmes. L’action des policiers est alors précieuse : ils peuvent venir constater les événements de visu et dresser un procès verbal détaillé, ce qui fournira un document fiable pour la suite de l’étude et la résolution du cas. Ils pourront également effectuer des surveillances pour préserver la sécurité des personnes et des biens, ou surprendre des employés qui simuleraient des poltergeists en lançant des objets. Les ouvrages du Commandant de gendarmerie Tizané fournissent à ce propos de succulents exemples, quoique anciens.

Les fraudes

Dans les dossiers sur lesquels ils enquêtaient, les parapsychologues ont souvent découvert que des sujets simulaient les poltergeists en provoquant eux-mêmes les dégâts (en cassant des objets ou les renversant, en lançant des pierres, etc.). Alan Gauld a relevé des « fraudes » dans 12% des cas, et Hans Bender dans 26%, et ceci même dans les cas où on avait pu mettre en évidence par ailleurs des événements paranormaux. Il convient donc de rester très prudent et d’adopter une attitude nuancée : ce n’est pas parce qu’un sujet « fraude »* ou simule, qu’il s’agit obligatoirement d’un faux poltergeist. Tizané faisait remarquer que les gendarmes prenaient souvent un sujet en flagrant délit, et décrétaient que l’affaire était résolue, alors qu’il n’en était rien, certains phénomènes restant totalement inexpliqués. Cette simulation peut s’expliquer d’un point de vue psychologique : le sujet est soulagé lorsqu’il arrive des événements, et d’un certain côté il est heureux que l’on s’intéresse à lui. Quand plus rien ne se passe, il est tenté d’agir lui-même physiquement pour combler le vide et retrouver une situation où son angoisse peut trouver un exutoire. Quelquefois, ces gestes des sujets ne sont pas vraiment conscients.

L’appel aux parapsychologues

Est-il envisageable d’appeler des parapsychologues* à la rescousse ? La réponse à cette question dépend du niveau de détresse des victimes. Si la situation n’est pas trop catastrophique, l’ambiance ne tournant pas à l’épouvante et les protagonistes n’étant pas complètement épuisés, l’appel à des parapsychologues est approprié. Si au contraire le niveau d’angoisse est tel qu’il faut en urgence faire cesser les phénomènes, mieux vaut faire venir immédiatement un psychologue* spécialisé ou un psychiatre. En effet, les parapsychologues ont pour but d’étudier les phénomènes. Ils ont donc intérêt à ce que les incidents durent et se reproduisent. Ils essaieront de les objectiver au maximum, c’est à dire de les photographier, les filmer, enregistrer les bruits et les variables physiques, etc. Ceci risque de prendre du temps, et quelquefois la famille ou l’entourage aura du mal à supporter que les choses ne se calment pas. Ce travail peut également impliquer la présence d’une personne extérieure au sein du foyer. Il n’est pas évident de tolérer une situation où l’on fait quelque peu figure de cobayes ! Néanmoins, si vous avez la possibilité de signaler votre problème de hantise ou de poltergeist, cela contribuera à faire avancer la recherche dans ce domaine.
Cependant, les parapsychologues sont généralement des chercheurs avertis des différents aspects de ces problèmes, avec en particulier une formation en psychologie. Ils sont donc susceptibles d’aider à faire cesser les manifestations. Il faut néanmoins préciser que le terme de parapsychologue n’est pas reconnu et qu’il n’existe pas encore de diplôme officiel. Aussi faut-il prendre garde à la façon dont on choisit l’intervenant.
En Allemagne, il existe une institution officielle, financée par l’état, le WGFP*, qui possède un service d’accueil (un bureau de consultations) pour les phénomènes paranormaux. Cet institut reçoit en moyenne un appel tous les quatre mois concernant des cas de poltergeists, ce qui montre que ce phénomène n’est pas aussi rare qu’il n’y paraît, mais c’est à comparer à un total de quelques 3000 demandes annuelles adressées au bureau concernant des expériences « inhabituelles » ou supposées paranormales. Un documentaire a été diffusé sur ARTE à propos des activités de ce bureau : « Geister sind auch nur Menschen » (Les esprits, des gens comme vous et moi), de Volker Anding, ZDF 2000. Un autre organisme allemand, l’IGPP, possède également un service de consultations avec plusieurs psychologues. En Grande Bretagne, plusieurs départements universitaires étudient la parapsychologie et enquêtent parfois sur les fantômes. On peut citer par exemple l’Université de Hertfordshire ou celle d’Edimbourg.

Il n’existe pas d’institution équivalente en France à l’heure actuelle, mais on pourra toujours s’adresser à l’IMI pour obtenir des coordonnées de spécialistes. L’un de ses membres, Djohar Si Ahmed, psychanalyste, est intervenue régulièrement dans des affaires de poltergeists et elle a relaté quelques-uns uns de ces événements passionnants dans son ouvrage « Parapsychologie et psychanalyse ».

Vous pouvez vous adresser également à des associations comme ONDES ou Sixième Sens, qui recueillent des témoignages. Malheureusement, ici comme dans d’autres domaines du paranormal, le refus de reconnaissance sociale et institutionnelle, et de prise en compte des problèmes, conduit à la prolifération de charlatans qui occupent le devant de la scène alors que le travail scientifique est méconnu ou déprécié.

Faut-il déménager ?

Certaines familles choisissent la fuite et décident de quitter leur lieu de résidence. Si un déménagement peut résoudre le problème, pourquoi pas ?
On constate souvent que certains lieux mettent la plupart des visiteurs mal à l’aise. Bien qu’il soit difficile d’en analyser les causes, il n’en reste pas moins que certaines ambiances sont désagréables. On peut incriminer la disposition des lieux ou leur histoire, ou encore l’humidité… Dans ce cas, pourquoi s’obstiner à habiter un endroit inhospitalier ?
Les Américains, plus pragmatiques que nous, ont été jusqu’à adopter un texte de loi dans l’Etat du Connecticut, sur les « biens immobiliers psychologiquement chargés ». Toutes les agences immobilières et les vendeurs de maison sont tenus de révéler à leurs acheteurs potentiels le « passé psychique » de leur demeures. Des personnes sensibles peuvent être affectées par la pensée que leur maison a été la scène d’un drame. Aussi, ne serait-ce que pour des raisons psychologiques, il vaut mieux dans ce cas qu’elles s’abstiennent d’habiter cet endroit. Tout le monde n’a pas forcément envie d’affronter une maison hantée, bien que certains intrépides les recherchent au contraire.
En ce qui concerne les poltergeists, en théorie centrés sur un individu, le problème est censé suivre la famille même si elle déménage. Aussi une telle décision ne doit-elle être prise qu’après avoir mûrement réfléchi. Il arrive que les phénomènes se reproduisent dans la nouvelle habitation au bout de quelques mois, quelquefois avec une intensité accrue.
Dans la pratique, il n’est pas toujours aisé de différencier hantise et poltergeist, et de savoir à quel point le lieu est un facteur déterminant. Il existe même des cas de poltergeists où un déménagement a semblé bénéfique. Tout changement dans la vie de la famille, dans l’ambiance de la communauté, est susceptible de provoquer une réorganisation de la dynamique psychique* du groupe, et donc de mettre fin aux dégâts. En effet, le poltergeist ne semble se perpétuer que grâce à un système en équilibre complexe, fragile.
Il est donc utile de solliciter les conseils de spécialistes avant de prendre l’initiative de changer de domicile.

L’efficacité de la suggestion

Certains parapsychologues comme par exemple Tony Cornell, ont réussi à faire cesser les phénomènes en assurant avec conviction qu’ils ne se reproduiraient plus [Cornell, 2002]. Cette méthode relève de la suggestion, car il s’agit de convaincre entièrement les victimes que la fin de leurs soucis est proche. Ainsi, Cornell cite plusieurs cas où il a tenté d’impressionner et de suggestionner la maisonnée, semble-t-il avec un certain succès. Une histoire curieuse est celle d’un bureau d’une petite entreprise des Midlands où, en 1986, il avait conseillé à la directrice de cacher, à l’insu de tous, des crucifix sous les bureaux ou derrière les tableaux des murs. Cette technique s’est révélée efficace puisque les poltergeists ont cessé ! A noter que c’est aussi par suggestion que les charlatans et divers escrocs réussissent quelquefois à résoudre le problème, mais, dans ce cas, après avoir délesté les victimes de toutes leurs économies.

La méthode de la suggestion a ses limites : dans un autre cas datant de 1967 (dans un village du Norfolk), les phénomènes sont réapparus quelques mois après l’intervention de Cornell. On peut supposer que les problèmes de départ à l’origine du poltergeist n’ayant pas été résolus, les troubles se sont fait sentir de nouveau, sous une forme ou sous une autre.